30 avril 2011

Tango [tabac.alcool.ecstasy]


Si vous passez à Québec au mois de mai, allez célébrer les 15 ans de tango argentin à l’Avenue Tango, première école de tango argentin de cette ville. Jeudi 26 mai, vendredi 27 et samedi 28, trois soirées thématiques autour de l’histoire du tango, soirées suivies d’une milonga.

Tango Tabac ou le tango comme une histoire de séduction, de sensualité, de féminité...

Tango Alcool avec les rivalités mises à jour, la violence des sentiments, les passages à l’acte...

Tango Ecstasy, dernier spectacle de ce triptyque dont on n’ose imaginer la fin !

L’ensemble est mis en scène par Christophe Vienne, lui-même tanguero et placé sous la direction artistique de Nancy Lavoie, directrice de l’Avenue Tango qu’elle a fondée en 1995.

Pour plus d’informations… et pour réserver, c’est ici

Photo : Francis Fontaine

21 avril 2011

La dernière fois

Comment c'est un dernier tango ? Et comment sait-on que c'est la dernière fois que nous danserons le tango ?


"Elle dansait avec moi depuis 5 ans ; quelquefois l'un ou l'autre partagions une tanda avec un(e) autre partenaire mais nous savions que nous commencerions et finirions ensemble la milonga. Et puis c'est arrivé. Je l'ai compris très vite dès qu'il l'a enlacée. A la fin de la série de 3 ou 4, je crois plutôt que c'était 4 car le temps m'avait paru interminable. Jorge, -il s'appelait ainsi- l'a raccompagnée et dans ses yeux, lorsqu'elle m'a regardé, quelque chose avait changé : un éclat, une brillance inhabituelle... Ce fut mon dernier tango, je veux dire que depuis ce jour où nous nous sommes séparés, je ne danse plus."

"Cet été là, il faisait très chaud, j'avais dansé une grande partie de la nuit et il restait encore plusieurs couples, infatigables, ravis, jouissant d'un superbe parquet, ils en redemandaient. Bien que je commençais à ressentir une certaine fatigue, je ne voulais pas être en reste et plusieurs femmes seules attendaient le plaisir et la danse. Tangos, milongas, valses et de nouveau tangos, milongas, valses... Je ne sais plus très bien si c'est arrivé avec un Biaggi ou un Sanchez Gorrio, toujours est-il qu'une violente décharge m'a transpercé la poitrine me clouant net sur la piste au moment où je m'apprêtais à faire un tour. Lisa, ma partenaire, m'a tout de suite emmené à l'extérieur de la salle et a passé un appel sur son portable. Certainement le 112... Quelques minutes plus tard, je compris, en entendant les sirènes d'une ambulance qui se rapprochaient au fur et à mesure que je m'éloignais de Lisa, de la musique, de la vie, je compris que je venais de faire mon dernier tango."

"Le tango c'est un peu comme l'amour, ça peut faire du bien, beaucoup de bien. Il n'était pas un danseur hors-pair mais j'aimais son style, sa singularité. Nous nous étions rencontrés dans une milonga de Barcelone où il passait des vacances avec sa famille... Sa femme et ses enfants je veux dire. Mais elle n'aimait pas danser. Il était donc venu seul à la milonga et nous étions repartis ensemble dans un petit hôtel. Ce soir là, je devins "sa" danseuse mais aussi sa maîtresse, comme dans les romans du Divin Marquis. Jamais expérience ne fut si troublante, si complète, si sensuelle :il décidait dans la danse, je décidais dans l'amour. Nous avons ainsi passé des centaines de nuits blanches, rouges et noires. Et puis, je ne sais pas pourquoi, j'ai voulu partager les jours aussi avec lui, pas seulement les nuits. J'ai commencé à lui en parler, lui dire que nous pourrions vivre ensemble, qu'il pourrait divorcer mais je sentais bien qu'il fuyait la conversation... qu'il fuyait notre garçonnière... qu'il fuyait le tango. Nous ne nous voyons plus. J'ai tout arrêté : l'amour et le tango. Le tango, c'est un peu comme l'amour, ça peut faire mal, très mal."

12 avril 2011

Etrange espoir

Il doit être près de 17h lorsque je me réveille, la bouche sèche, les orbites rougis. La fête de la veille avait duré trop longtemps, trop d'alcool, trop de tabac. Et cette blonde qui ne cessait de me regarder sans me voir. Pourquoi m'avait-elle à ce point angoissé et fatigué. Que vais-je devenir aujourd'hui ? Le téléphone sonne. C'est A, elle me parle d'une milonga ce soir dans un nouvel endroit. Elle me demande de venir. Elle a envie de danser. "Je ne sais pas, je vais voir". Je raccroche...

La voiture roule vite, sur l'autoroute je ne fais pas attention aux autres, je suis toujours sur la file de gauche à 180 et comme il fait très chaud, j'ai baissé la capote. J'écoute à fond l'album "Inspiracion Espiracion" et je saigne du nez...
A la station service, ça sent mauvais, les toilettes sont sales et il n'y a rien pour s'essuyer les mains. Dans le miroir piqué, un type me regarde... Je ne m'étais pas reconnu. Je vomis. Je crois que je suis encore amoureux d'elle. Je bois un, puis deux Jack Daniel's.
Il fait nuit. Pour rester sur l'autoroute, je dois suivre les feux arrière des autres voitures, les plus rapides. La radio parle d'un pays en train de disparaître sous une vague géante. Encore quelques secondes.
Dans l'entrebaillement de la porte, A est là, je sais qu'elle m'a toujours plu, je frissonne... Embujamiento, remembraza, mi taza de cafe.

Pochoir de Jef Aérosol

3 avril 2011

Argentina de Muñoz

Il faut croire que la rencontre entre Pierre-André Sauvageot et José Muñoz était inscrite depuis fort longtemps. D’un côté, un homme passionné de BD et de romans policiers, réalisateur du «Jean-François Vilar, 95% de réel » ou encore du « Tardi en noir et blanc », et de l’autre un dessinateur épris de noir et blanc depuis son plus jeune âge, auteur avec son complice Sampayo d’un des plus beaux styles de la bande dessinée depuis plus de 30 ans.

Cette rencontre –Sauvageot/Muñoz – a débouché sur une grande amitié et sur un très beau film : « Argentina de Muñoz». L’avant-première qui s’est déroulée à Caen lors du 5ème CinéTango a permis aux bédéphiles, aux tangueros, aux cinéphiles et autres amoureux d’être le témoin du retour du dessinateur dans la ville de son enfance et adolescence.

Pierre-André Sauvageot prend le temps de suivre l’artiste dans la Pampa à la recherche de la maison de son enfance ou encore à Buenos-Aires dans les différents barrios où vécurent son grand-père, ses parents et ses professeurs et maîtres. Scènes fortes, émouvantes quand Muñoz évoque le sculpteur Huberto Cerantonio dont la fresque dans le quartier de la Boca est laissée à l’abandon.

La ville que nous fait découvrir le cinéaste est loin des clichés touristiques même si le tango est très présent dans les paroles, les dessins et les rencontres qui jalonnent le film. Muñoz raconte l’histoire de son enfance et adolescence sans jamais oublier l’Histoire de l’Argentine : les immigrants, Perón, les disparus, les réfugiés.

Quant à la lumière automnale qui éclaire tout le film, elle peut paraître en contraste avec l’œuvre du dessinateur mais elle existe aussi pour évoquer la genèse de l’ombre et de la lumière, profonde respiration des dessins de José Muñoz.

Photo : José Muñoz lors de la dédicace