De la même façon qu’il est nécessaire de sauvegarder la musique et les chansons de tango, de la même façon qu’il faut rechercher, ré-éditer des disques, faire connaître au public les tangos et interprétations que l’on croyait disparus, un travail similaire est à réaliser pour les films qui évoquent le tango.
Il en est ainsi du très beau document de
Jana Bokova «Tango Mio» projeté sur Arte à l’époque où Thierry Garrel dirigeait le service Unité Documentaires.
En août 1968, Jana Bokova quitte la Tchécoslovaquie, fait une école de cinéma à Londres et s’installe à Buenos Aires où elle rencontre le tango.
Jana Bokova : «J’ai décidé de réaliser un film sur l’âme du tango. C’est une musique qui me touche beaucoup, par sa mélancolie, sa tristesse… J’ai donc convaincu la BBC, ce qui n’était pas facile, car à l’époque, le tango n’était pas à la mode, les gens ne savaient même pas ce que c’est, si c’est une danse ou une boisson, surtout en Angleterre…»
Et c’est ainsi qu’elle réalise en 1985, entre documentaire et fiction, «Tango Mio» sur la vie des tangueros et tangueras de Buenos Aires. J. Bokova suit principalement deux personnages tout au long du film : Suzanna, la Morocha qui chante dans les cafés et les cours de Buenos Aires, elle chante pour le peuple de Buenos Aires, celui dont il est question dans les textes de Discepolo, de Manzi ou Cadicamo. Le second personnage de «Tango Mio» suit les traces d' Eduardo Arolas surnommé le Tigre du bandonéon et dont la mort à Paris à l’âge de 32 ans reste un mystère.
Les couleurs de la ville, les visages, les cafés et les ponts, le quartier de la Boca… Un Buenos Aires loin des cartes postales ; Jana Bokova donne à voir, à entendre quelque chose de l’ordre du social et du politique à travers l’âme du tango.
On y rencontre également Osvaldo Pugliese, Roberto Goyeneche, Maria Nieves, Raul Gimenez ou encore le célèbre couple de danseurs Elvira et Virulazo.
Il faut montrer partout ce film, le distribuer de nouveau, le réclamer auprès des exploitants, le programmer dans les festivals... C’est ainsi qu’il pourra être sauvé.
Jana Bokova a réalisé en 2003 un autre film sur le tango argentin «Tango Salon : la Confiteria Ideal».
Les propos de Jana Bokova ont été recueillis par Magdalena Segertová pour Radio Praha.