24 juillet 2009

Ce tango que nous aimions tant...

Lieu : un ancien théâtre qui a gardé ses rideaux, quelques fauteuils et des morceaux de décors ; une atmosphère s'en dégage, un mystère... Aujourd'hui, c'est un café.
Figurants : quelques couples bavardent, des hommes jouent aux cartes, boivent ou flirtent…
Acteurs : près du bar, se tient un couple, qui n'en est pas un ou qui n'en est plus un…
Cette femme, cet homme nous intéressent.
La femme doit avoir la quarantaine, châtain foncé, yeux verts, légèrement maquillés. Elle porte une robe en voile de coton rouge. Elle est encore très belle.
Lui n'est guère plus âgé, d'apparence ordinaire mais si on le regarde plus attentivement, on devine pourquoi un jour elle a été séduite, emportée, "sous le charme".

Elle : "Quelquefois je me demande ce que nous serions devenus si nous nous étions mariés tous les deux.
Lui : Vous n'auriez pas rencontré la danse, vous n'auriez pas voyagé … Je n'aurais pas connu d'aventures, d'autres continents…
Elle : Mais vous n'auriez pas souffert, vous n'auriez pas été blessé… Nous aurions appris ensemble à danser. Peut-être seriez-vous même devenu professeur…
Lui : Et vous, qu'avez-vous fait pendant toutes ces années ? Autrefois, vous m'aviez dit que vous ne vouliez pas de vie de famille, de vie monotone... Parlez-moi de vous…
Elle : Ma vie a été pleine de surprises. Un jour ici, un autre à Buenos Aires, une nuit sans sommeil et une autre à plaire… Est-ce que vous avez peur de vieillir ?
Lui : J'ai peur d'arriver en avance, de ne plus avoir de temps pour être avec vous, je désirais tellement vous revoir, vous sentir là, à mes côtés. Dîtes-moi que toutes ces années vous m'avez attendu, que vous m'avez cherché dans le monde, dans les guerres, …
Elle : Ne dis plus rien… Je t'en prie. Chaque nuit passée avec un homme, c'était avec toi que je la passais, ne parle plus... Toi seul a compté.

... Regarde, c'est comme avant, nous sommes dans une milonga, un bandonéon joue le tango que nous aimions tant tous les deux. Dehors, la nuit a commencé à tomber, tu vas me prendre dans tes bras, m'inviter à danser et tu me diras des mots tendres, des mots d'amour… Tu vois, rien n'a changé…
Lui : Oh, je voulais tant te revoir, entendre ta voix, te retrouver. Pourquoi cela a-t-il été si long, pourquoi ?"

Peinture de Murat Erdemsel

9 juillet 2009

Maintenant ou jamais

En quelque temps et sans beaucoup d’efforts, ce sont près de 100000 tangos qui pourraient à tout jamais disparaître. Enregistrés sur vinyl lors de la première moitié du XXème siècle, éparpillés en Argentine, Uruguay et Japon, ils retiennent aujourd’hui toute l’attention d’un artiste : Ignacio Varchausky. N'oublions pas que dans les tristement célèbres années 70, des maisons d'édition ont passé au pillon des centaines de matrices de disques de tango...

Ignacio Varchausky est connu à double titre dans le monde du tango : il est le contrebassiste de El Arranque et il a réuni de « vieux jeunes musiciens » autour de Emilio Balcarce. Il suffit de voir le film « Si Sos Brujo » pour se rendre compte de la volonté, de la passion dont est animé Ignacio.

Depuis trois ans, le voilà engagé dans ce vaste projet : sauvegarder et digitaliser ces milliers de tangos. L’association TangoVia Buenos Aires a déjà sauvé Gobbi, Salgan, Troilo ou le chanteur Ignacio Corsini…
Pour poursuivre et mener à bien son travail, TangoVia Bs As a bien sûr besoin de soutien, de fonds publics et privés.
Le lien ici : http://www.tangovia.org/

1 juillet 2009

Tangos d'été

J'étais resté plus d'une semaine sans danser mais non sans avoir goûté seul à des tangos que je découvrais pour la première fois. Parmi eux, "El Recodo" et "La Viruta" de Biaggi sur lesquels je l'imaginais enlacée à moi, étourdie par le bandonéon et la voix de Hugo Duval... La passion que je porte à cette danse et l'immense tendresse que je réserve à ma partenaire me sont insupportables lorsque je manque trop longtemps de l'une ou de l'autre.

Ce soir là, il y avait une milonga dans un endroit situé dans une arrière-cour du 13ème arrondissement, ce devait être un ancien cinéma au regard de vieilles affiches déchirées dont les bouts de titre évoquaient quelques films coquins. Lorsqu'elle me vit, elle me prit par la main et me conduisit tout de suite dans la milonga, sans dire un mot. Elle posa délicatement son bras gauche autour de mes épaules, sa main caressant mes cheveux avant de se reposer sur mon cou. Après tout ce temps sans danser, il fallait que nos corps se retrouvent.

Je sentais qu'elle brulait comme moi de danser, je l'entraînai alors sur la piste , elle se laissa guider. "Poema"... Nous dansions doucement, lentement, je frémissais dès que ses doigts effleuraient ma nuque. En dansant, je sentais le mouvement de ses jambes qui s'accordaient si bien avec ce que je désirais, j'étais attiré par ses pieds et m'ancrais ainsi dans la terre. Elle comprenait mon manque, elle entendait ma faim. Il me semblait que ce Poème durait, durait, durait…
Je n'imaginais pas encore qu'il s'agissait d'une promesse de plaisirs encore plus intenses à venir : "Golgota", "Tu, el cielo y tu", "la melodia del corazon"…
Graffiti de Miss Tic (Paris XIIIème)